Quelles alternatives au « tout béton » dans l’Océan Indien ?

Historiquement la case créole traditionnelle était « géo et biosourcée »

À la Réunion comme dans le reste de l’Océan Indien, les matériaux de construction utilisés par les hommes ont toujours été historiquement issus d’un milieu proche : Arbre du voyageur, Latanier, Vetiver…  Ce n’est que depuis les années 1950/60 et l’arrivée des constructions « tout béton » venues de la reconstruction d’après-guerre en Europe que les territoires de l’Océan Indien ont commencé à changer de mode de construction : la case créole traditionnelle en bois s’est doucement perdue pour être remplacée par des matériaux de construction importés (parpaing, ciment, tôle). Ce radical changement des méthodes et principes de construction est principalement dû à la forte croissance démographique ainsi que de la nécessité de loger la population grandissante de nos territoires.

Exemple de case créole en bois

La fabrication de 1m3 de béton émet plus de 270 kgCO2 eq à la Réunion*

Dans un contexte de changement climatique, il est nécessaire de réduire l’impact carbone et l’utilisation de ressources de nos constructions. Le secteur du bâtiment (construction et exploitation) est responsable en France de :

  • 40% de la consommation d’énergie
  • 50% des consommations des ressources naturelles (carrières, bois, eau, pétrole, etc)
  • 40% des émissions du CO2
  • 50% de la production de déchets

A la Réunion, la phase de construction représente jusqu’à 30% des émissions de CO2 du bâtiment sur une durée de vie de 50 ans. Pour réduire l’impact environnemental du secteur du bâtiment, des alternatives aux modes de constructions actuels existent, notamment via l’intégration de matériaux biosourcés.  Les différents territoires de l’Océan Indien offrent un large panel de solutions constructives alternatives.  

Ecole Rue Pothier à Saint-Paul, Photographie : Frédéric Lancelot

Le bois, créateur de « puits de carbone »

A la Réunion, le bois est utilisé au niveau des protections solaires, de la charpente, et de plus en plus dans l’enveloppe comme élément porteur (mur à ossature bois, plancher bois, etc.). Le bois contient du carbone qui a été soustrait à l’atmosphère lors de la croissance de l’arbre, permettant ainsi de créer des « puits de carbone ». La mise en œuvre d’un plancher en bois (CLT) par rapport à un plancher béton permet, par exemple, de réduire les émissions de carbone du projet de 170kgCO2 eq/m² SU selon l’outil TEC-TEC.  Outre l’aspect carbone, le bois présente de nombreux avantages. Au niveau thermique, le bois est un matériau effusif stockant peu de chaleur. Concernant le chantier, les éléments en bois préfabriqués sont plus rapides et plus propres à mettre en œuvre.  

Sous réserve de respecter les bonnes pratiques sur le choix de l’essence, de protection contre l’humidité ou les attaques d’insectes, l’utilisation du bois est pérenne à La Réunion.

L’expansion de la BTC à Mayotte

La BTC (Brique de Terre Compressée) est mise en œuvre essentiellement dans les constructions traditionnelles à Mayotte. La brique de terre compressée est un dérivé de l’adobe, l’un des tout premiers matériaux de construction utilisés par l’Homme. Elle est fabriquée à partir d’argile tamisée, humidifiée puis compressée dans des moules par une presse mécanique. Elle est utilisée en gros-œuvre (soubassement), comme mur de remplissage (ossature-bois par exemple) ou encore comme cloisonnement.

La BTC est un matériau circulaire pouvant être recyclé sans grand apport d’énergie. La ressource en terre est abondante et permet d’être utilisée directement sur le site de construction tout en évitant l’appauvrissement des carrières. Le bilan carbone global de la BTC est faible : moins de 20kgCO2/m² de façade. Effectivement, la BTC demande peu de transformation et très peu de transport comparé aux autres matériaux issus d’une filière plus carbonée comme les produits cimentés / goudronnés.

La filière BTC et les règles techniques sont en cours de structuration à Mayotte. De nombreux projets ambitieux ont recours à ce matériau.

Exemple de projet à Mayotte utilisant de la BTC, LYCÉE DES MÉTIERS DE LONGONI, Vice rectorat de Mayotte

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Vers des isolants biosourcés et géosourcés ?

Il existe de nombreux isolants biosourcés issus par exemple de la paille, de la ouate de cellulose, des fibres de bois ou encore de la laine de chanvre. A la Réunion, la bagasse, le goyavier, le cryptomeria ou encore le Vévitier sont des potentielles sources d’isolants identifiées. Les filières et les règles techniques restent néanmoins à développer et structurer.

Pour être efficacement déployés, les produits isolants à base de fibres végétales, à l’instar des produits traditionnels, doivent respecter un certain nombre de conditions de mise en œuvre : aptitude à l’emploi, résistance au feu, à l’humidité, aux attaques des insectes et moisissures, etc. L’incorporation de substances antifongiques, insecticides ou autres biocides peut être nécessaire pour assurer la pérennité des performances de tels isolants et leur durabilité.

De nombreuses autres initiatives locales existent pour diminuer l’impact environnemental des constructions de l’Océan Indien : développement de la filière bambous, bétons végétaux, recours au réemploi… Depuis 2004, INTEGRALE Ingénierie accompagne les maîtres d’ouvrage et maîtres d’œuvre dans l’océan indien à la réduction de l’impact environnementale de leurs bâtiments.

*soit l’équivalent 1,5 vol Réunion / Mayotte.
Source
  • BioRev’Tropics – Le recours aux matériaux locaux par la construction en milieu tropical, 2018, Nomadéis, BioBuild Concept, LEU, Dieccte, CAUE
  • ISOBIODOM – Isolants biosourcés dans les départements d’outre-mer, CIRBAT, FCBA, CSTB
  • Règles professionnelles blocs de terre comprimée Mayotte, 2022, A.MISSE, CRATERRE, ART.TERRE, DEAL MAYOTTE
  • Outils TEC-Tec et MAY-Tec
  • TROPIKACV, Université de la Réunion, LAB PIMENT, Integrale Ingénierie, CSTB

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